IdT – Les idées du théâtre


 

Argument

Le Cercle des femmes 

Chappuzeau, Samuel

Éditeur scientifique : Piot, Coline

Description

Auteur du paratexteChappuzeau, Samuel

Auteur de la pièceChappuzeau, Samuel

Titre de la pièceLe Cercle des femmes 

Titre du paratexteArgument

Genre du texteArgument

Genre de la pièceComédie

Date1656

LangueFrançaise

ÉditionLyon : Chez Michel Duhan, 1656

Éditeur scientifiquePiot, Coline

Nombre de pages5

Adresse sourceA numériser (édition en ligne de mauvaise qualité)

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Mise à jour2017-03-30

Mots-clés

Mots-clés français

GenreEntretien comique

SourcesÉrasme

Personnage(s)Docteur ; Femme savante ; Faux-noble

FinalitéFaire rire

ActualitéThématiques du temps

Mots-clés italiens

Mots-clés espagnols

Présentation

Présentation en français

S’il s’agit bien ici d’un « Argument », car Samuel Chappuzeau évoque le sujet de chacune des « entrées » de sa comédie, ce paratexte adopte aussi les lieux du discours préfaciel : l’auteur rappelle sa source, les « Colloques » d’Érasme, pratique l’éloge détourné de son prédécesseur pour mettre en valeur sa propre pièce, prévient les éventuelles critiques relatives à un comique parfois libre et en appelle finalement à la bienveillance du lecteur.

Chappuzeau inscrit surtout sa pièce dans les mœurs et le goût du temps en relayant dans sa préface des idées très contemporaines. La réflexion sur la satire, à la mode et considérée comme  inoffensive lorsqu’elle est de bon ton, rappelle les considérations scudériennes du roman Artamène ou Le Grand Cyrus, qui vient de paraître. La réflexion sur les droits des femmes et le rapport entre les sexes est également un sujet de conversation récurrent dans les salons mondains. La préoccupation au sujet de la véritable noblesse menacée par les impostures des roturiers est un motif littéraire récurrent dans la littérature de cette époque et le personnage du valet déguisé en noble avait déjà été exploité avec succès par Scarron dans son Héritier ridicule en 1650. L’appel au rire, enfin, encadrant le propos, correspond à un nouveau discours ambiant qui fait du rire une valeur galante et positivement connotée. En bonne galanterie, il convient de divertir la compagnie en trouvant « le mot pour rire », quitte à faire montre d’un détachement vis-à-vis  de soi-même en se laissant aller à l’autodérision.

Les expressions qui soulignent l’actualité sont nombreuses dans cette préface : pour cette toute première publication théâtrale, Chappuzeau tient manifestement à souligner qu’il est sensible aux évolutions du goût et des modes contemporaines, et qu’il est apte à y répondre.

Texte

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Argument

{NP1}La satire que par des noms plus doux je puis appeler la belle raillerie et la censure agréable du vice a aujourd’hui plus de vogue que jamais ; chacun se pique de trouver le mot pour rire ; et à moins que d’être de mauvaise humeur1 et de peu d’esprit, l’on ne peut s’offenser de ces jolis traits qui percent sans douleur, et qui lèvent toute honte à la vérité qui souvent n’ose paraître nue2. Cet entretien qui n’est pas assez étendu ni assez dans les règles pour tenir lieu d’une comédie, mais qui d’ailleurs3 vaut mieux qu’une farce, a trois ou quatre scènes très galantes ; et sans parler des hôtelleries de Lyon et d’Allemagne4 qui y sont naïvement déchiffrées5, l’entrevue d’un {NP2} Docteur et d’une femme savante6, les instructions du premier à un rustaud de village pour devenir Gentilhomme7, et les merveilleuses règles que le beau sexe se veut désormais prescrire8, sont des pièces très fortes, très adroitement conduites, et en un mot tout à fait du temps. Je ne me jetterais pas de la sorte dans les louanges de cet ouvrage si je pouvais m’en dire l’auteur ; il n’y a du mien que la traduction et l’agencement, et ce sont en effet9 des passages tirés des dialogues de l’aimable Érasme10, qui, depuis l’Empire de Charles Quint sous lequel il vivait dans une très haute réputation, a rempli l’univers de son nom et de ses ouvrages. C’était un savant esprit, et un esprit enjoué ; tous les curieux honorent et chérissent sa mémoire, et sans me jeter plus avant dans ses louanges, j’ajouterai seulement pour ce qui regarde le discours présent, et pour {NP3} apaiser ceux qui trouveraient quelques passages trop libres, qu’Érasme ne censure que les désordres de son siècle, et la noblesse de la Province de Gueldres11 voisine du lieu de sa naissance, qui se croyait tout permis, et qui s’emportait dans de grands excès ; ce qu’il témoigne ouvertement sur la fin de son dialogue De rebus et vocabulis, qu’il conclut par ces mots : Isti sibi permittunt bellum, cui velint, indicere, etc. Atqui tales habet non paucos Sicambria12. Mais notre siècle, grâce à Dieu, est beaucoup plus sage, la noblesse aujourd’hui, surtout la française, est très vertueuse et très retenue, j’entends la véritable, fondée sur la naissance et les belles qualités de l’âme, la franchise, la politesse et la générosité. Il s’en trouve en effet qui, sortis de bas lieu et n’ayant aucune éducation, empruntent le nom de gentilshommes, et se couvrent {NP4}d’un faux manteau de noblesse pour s’emporter plus facilement dans les vices qu’Érasme reprend : et c’est seulement contre ceux-ci qu’il s’emporte lui même ; les autres ne s’en pouvant fâcher, comme ils n’y doivent prendre aucune part. J’avoue pourtant, puisque l’usage s’est rendu de tout temps la règle du discours et des actions, que la passion du jeu n’est pas dans la noblesse une passion vicieuse ; il13pourrait être défendu à ces petits gentilshommes qui n’ont pour tout vaillant14 que l’épée et la cape, et qui auraient meilleure grâce, s’ils possèdent avec cela quelque petit fief, à prendre eux mêmes le soin de leur revenu : mais ceux qui ont de grands biens, qui se voient maîtres de plusieurs châteaux, de qui relèvent des pays entiers, ont droit ce me semble de se divertir, et de se divertir noblement, le gain ou la perte d’une grande somme laissant {NP5} toujours leur esprit dans la même assiette15, et leur parole en fait de jeu se trouvant plus ferme que mille contrats. Cet entretien n’a pas besoin d’autre apologie, et je me persuade que j’aurai des lecteurs équitables et de belle humeur, jusqu’à rire d’eux-mêmes s’ils se trouvent taxés en quelque lieu.