IdT – Les idées du théâtre


 

Agésilas, tragédie en vers libres rimés

Corneille, Pierre

Éditeur scientifique : Michel, Lise

Description

Auteur du paratexteCorneille, Pierre

Auteur de la pièceCorneille, Pierre

Titre de la pièceAgésilas, tragédie en vers libres rimés

Titre du paratexte

Genre du texte

Genre de la pièceTragédie

Date0000

Languefrançais

ÉditionG. de Luyne, 1666, in-12°

Éditeur scientifiqueMichel, Lise

Nombre de pages2

Adresse sourcehttp://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k70403j/f3.image

Fichier TEIhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/tei/CorneilleAgésilasPréface.xml

Fichier HTMLhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/html/CorneilleAgésilasPréface.html

Fichier ODThttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/odt/CorneilleAgésilasPréface.odt

Mise à jour2016-11-18

Mots-clés

Mots-clés français

SourcesPlutarque

Sujethistorique

Finalitédivertir

ExpressionManière nouvelle (vers mêlés)

AutreHorace, Art poétique ; progrès ; nouveauté

Mots-clés italiens

FontiPlutarco

Argomentostorico

FinalitàDivertire

EspressioneNuova maniera (versi misti)

AltriOrazio, Arte poetica ; progresso ; novità

Mots-clés espagnols

FuentesPlutarco

TemaHistórico

FinalidadEntretener

ExpresiónManera nueva (versos mezclados)

OtrasHoracio, Arte poética ; progreso , novedad

Présentation

Présentation en français

La tragédie d’Agésilas fut jouée dans les derniers jours du mois de février 1666 à l’Hôtel de Bourgogne1, et publiée en avril de la même année. Dans sa préface, Corneille mentionne d’abord brièvement sa source historique, Plutarque, sans entrer dans le détail du sujet ni des modifications qu’il y a apportées. Le propos met surtout en avant la nouveauté dans la « manière » de la pièce, et l’aspect audacieux, donc risqué, que comporte toute entreprise inédite. Cette « manière », pourtant, n’est ni explicitement nommée, ni même décrite. Neuve, la pièce de Corneille ne l’est pas réellement sur le plan de l’invention ni de la disposition. Certes, les enjeux amoureux sont ici multipliés d’une façon remarquable, mais le principe de l’intrigue galante dans la tragédie n’a en lui-même rien d’original, surtout lorsque les nœuds sentimentaux restent étroitement articulés à des enjeux politiques, comme c’est le cas ici. Si la tragédie est hardie, c’est avant tout parce qu’elle est entièrement composée de vers mêlés, octosyllabes et alexandrins surtout. La versification libre, courante dans le théâtre en Italie et en Espagne à la même époque, n’avait jamais, ou presque, été utilisée en France à l’échelle d’une pièce entière2. Les contemporains associaient habituellement les vers mêlés à l’expression d’un lyrisme poétique et galant proche du chant. Ils s’accordaient pour penser que son utilisation devait rester occasionnelle au théâtre, afin de ne pas contrevenir à la vraisemblance : la prose et l’alexandrin étaient seuls perçus comme proches du discours naturel. Dans l’Examen d’Andromède paru en 1660, Corneille avait déjà, précisément, mis en doute l’idée (défendue par l’abbé d’Aubignac) que le vers mêlé était moins naturel que l’alexandrin3. Il revendique ici le droit de s’écarter, sur ce terrain, des chemins battus pour tenter une expérience. Invoquant Horace pour affirmer que le respect que l’on doit aux Anciens ne doit pas conduire à condamner les innovations esthétiques, il développe ici des arguments qui, par la confiance qu’ils manifestent dans un progrès possible des arts, s’apparentent déjà à ceux d’un Moderne.

Texte

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AU LECTEUR4                

{NP1} Il ne faut que parcourir les vies d’Agésilas et de Lysander chez Plutarque pour démêler ce qu’il y a d’historique dans cette tragédie5. La manière dont je l’ai traitée n’a point d’exemple parmi nos Français, ni dans ces précieux restes de l’Antiquité qui sont venus jusqu’à nous, et c’est ce qui me l’a fait choisir. Les premiers qui ont travaillé pour le théâtre ont travaillé sans exemple, et ceux qui les ont suivis y ont fait voir quelques nouveautés de temps en temps. Nous n’avons pas moins de privilège. Aussi notre Horace qui nous recommande tant la lecture des poètes grecs par ces paroles

Vos exemplaria Graeca

Nocturna versate manu, versate diurna6,

ne laisse pas de louer hautement les Romains d’avoir osé quitter les traces de ces mêmes Grecs, et pris d’autres routes

Nil intentatum nostri liquere poetae

Nec minimum meruere decus, vestigia Graeca

Ausi deserere7.

Leurs règles sont bonnes, mais leur méthode n’est pas de notre siècle, et qui s’attacherait à {NP2} ne marcher que sur leurs pas ferait sans doute peu de progrès et divertirait mal son auditoire. On court à la vérité quelque risque de s’égarer, et même on s’égare assez souvent, quand on s’écarte du chemin battu ; mais on ne s’égare pas toutes les fois qu’on s’en écarte. Quelques-uns en arrivent plus tôt où ils prétendent, et chacun peut hasarder à ses périls.