IdT – Les idées du théâtre


 

Dédicace

La Tragédie d’Agamemnon avec deux livres de chants de Philosophie et d’Amour, par Charles Toutain

Toutain, Charles

Éditeur scientifique : Lardon, Sabine

Description

Auteur du paratexteToutain, Charles

Auteur de la pièceToutain, Charles

Titre de la pièceLa Tragédie d’Agamemnon avec deux livres de chants de Philosophie et d’Amour, par Charles Toutain

Titre du paratexteÀ très révérend et illustre prélat, Monseigneur Gabriel le Veneur, Évêque d’Évreux, Charles Toutain S.

Genre du texteDédicace

Genre de la pièceTragédie

Date1557

LangueFrançais

ÉditionParis, Martin le Jeune, 1557, in-4°

Éditeur scientifiqueLardon, Sabine

Nombre de pages4

Adresse sourcehttp://visualiseur.bnf.fr/CadresFenetre?O=IFN-8618489&I=1&M

Fichier TEIhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/tei/Toutain-Agamemnon-Dedicace.xml

Fichier HTMLhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/html/Toutain-Agamemnon-Dedicace.html

Fichier ODThttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/odt/Toutain-Agamemnon-Dedicace.odt

Mise à jour2013-03-31

Mots-clés

Mots-clés français

GenreTragédie

SourcesModèle antique

Personnage(s)Agamemnon

DédicataireVertu ; savoir

FinalitéNouveauté

Mots-clés italiens

GenereTragedia

FontiModello antico

Personaggio(i)Agamennone

Dedicatario e PersonaggioVirtù ; sapere

FinalitàNovità

Mots-clés espagnols

GéneroTragedia

FuentesModelo antiguo

Personaje(s)Agamenón

Dedicatario y personajeVirtud ; saber

FinalidadNovedad

Présentation

Présentation en français

L’épître dédicatoire de l’Agamemnon (1557) de Charles Toutain atteste la place de la tragédie dans le contexte littéraire des années 1550. Charles Mazouer1 rappelle combien les premiers dramaturges français des années 1553-1557 sont de jeunes auteurs, fréquentant des cercles communs : la Cléopâtre captive de Jodelle est jouée en 1553 au collège de Boncourt devant les jeunes poètes de la Brigade qui y ont même tenu, pour certains, un rôle, comme Jodelle (son auteur), Belleau et La Péruse. Cette préface de Toutain témoigne d’ailleurs de ses liens avec la nouvelle école poétique de la Brigade en évoquant le renouvellement des formes littéraires auquel il a désiré s’associer2, ainsi que les critiques que ce renouveau suscite chez des censeurs contemporains3. S’il n’apporte pas sa contribution à une quelconque réflexion sur le contenu ou les règles, l’auteur insiste donc, en revanche, sur cette nouveauté du « tragique théâtre » (« depuis naguère familier », « à raison de sa rareté et excellence », « comme marchant des premiers », « ce premier mets ») ; sur son lien avec la poésie (« Or n’y a-t-il étude en ce monde qui contente plus la viveté d’un esprit bien né que la poésie »), qui, à cette époque, se conçoit à l’imitation des Grecs et des Latins (l’on peut ainsi rapprocher le projet initial de l’auteur de pratiquer « l’élégie sur l’imitable façon de la grecque et latine » de son choix d’une « Agamemnonienne »4). Sa sélection d’un genre (la tragédie) comme d’un sujet participe d’une volonté de s’illustrer dans une forme littéraire nouvelle, imitée des auteurs antiques, en choisissant un domaine qu’il puisse être parmi les premiers à pratiquer. Les vingt dernières lignes d’éloge d’un protecteur « qui n’a en souhait et admiration que l’excellence des lettres et de la vertu » révèlent indirectement aussi cette place nouvelle du théâtre, désormais protégé par les grands. Plus que des idées du théâtre, c’est donc d’une nouvelle idée du théâtre en particulier, et des lettres en général, dont témoigne cette préface.

Texte

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À très révérend et illustre Prélat, Monseigneur Gabriel le Veneur, Évêque d’Évreux, Charles Toutain S.

[NP1]Tout ainsi (mon très révérend Seigneur) qu’avec notre naissance nous sont engendrées les étincelles de toutes sciences, outre le premier et péculier5 instinct de la perfection de notre nature, aussi doit tout bon esprit entendre ne lui être dénié tout divin sujet de l’entendement, auquel il doit et peut vaquer, selon que plus propre il s’y connaît, pour l’alternatif passe-temps de son but principal. À raison de quoi, m’étant mis devant les yeux toute manière de récréation, j’ai peu estimé celle-là qui légèrement emporte et perd avec soi son effet, à l’égard de celle dont s’ensuit, après un gentil allèchement et plaisir, je ne sais quel honneur de plus spacieuse et louable éternité. Or n’y a[-t-]il étude en ce monde qui contente plus la viveté d’un esprit bien né que la poésie ; de la[NP2]quelle, Monseigneur, me sentant aucunement6 aiguillonné, j’ai volontairement fait quelque relais au sévère labeur de nos Pandectes7, pour y passer les alternatives heures et Jouines8 dédiées au relâchement et récréation de cette mienne étude principale. Comme donc j’eusse considéré en chaque poème pour le jourd’hui tant de doctes hommes9, j’avais délibéré de n’entreprendre10 sur leurs premières inventions ; et pour ce faire je m’étais proposé l’élégie sus l’imitable façon de la grecque et latine. Laquelle entreprise ayant quelquefois11 espéré de publier, j’ai successivement12 attenté le tragique théâtre, depuis naguère familier en France par l’un des esprits plus13 admirés de cet âge14. Et ce qui m’a donné plus hardie opinion de publier cette Agamemnonienne15, ça été pour entendre un œuvre tel, à raison de sa rareté et excellence, coutumièrement être aujourd’hui entre les doctes désiré. Auxquels si je n’ai pensé pouvoir du tout satisfaire, au moins comme marchant des premiers, j’estime les mettre en si bon appétit qu’après plusieurs autres par divers bons esprits quelquefois publiées16, ils pourront retenir encore de ce premier mets quelque goût, non du tout indigne de leur avoir autrefois été présenté le premier. J’ai après discouru par quelques points plus politiques et de plus ardue invention, comme ayant tiré quelques arguments de la philosophie, avec diversité de [NP3]deux ou trois autres sujets de plus populaire et morale considération, non toutefois de labeur ou de moindre jugement. Ce qui reste de jeunesse sus la fin passera, Monseigneur, sous la candeur17 de votre bénignité, s’il advenait autrement que le sujet offensât l’austérité de quelques superstitieux Censorins18. Le tout finalement revu, prêt et ordonné pour entrer en public, je ne lui ai d’ailleurs invoqué sauf-conduit plus suffisant, Monseigneur, que le serein de votre bénigne grâce. À laquelle non autrement j’adresse le premier fruit de mes études que celui-là qui arrivé d’un étrange19 pays au sien n’a jamais contentement s’il n’apporte quelque cas d’inconnu, qu’il ne l’ait premièrement présenté à celui qu’il reconnaît son seigneur et aimé supérieur, qui fasse estime et qui admire son présent en sa qualité admirable. Car ce qui m’a donné meilleure hardiesse de les vous dédier, outre l’estime grande de votre maison de Carrouges (des environs de laquelle, Monseigneur, il vous plaira me reconnaître le plus humble et obéissant), ç’a été principalement la grande estime de votre vertu et fameux savoir, par lequel vous avez mérité dès votre jeunesse si très mûrement sage la dignité, où tant de vertus vous ont justement établi et de présent vous adjugent très bonne place au banc des plus doctes prélats de votre collège. Que s’il vous venait à plaisir de me faire entendre que ce peu de [NP4] commencement vous eût été agréable, je me promettrai[s] sus moi-même tel avantage, qu’au seul clin20 de votre commandement je pourrai[s] défier toute rigueur de laborieuse entreprise, tant fût-elle épineuse et de maniement ingénieux. Outre, Monseigneur, que je me peux assurer, quoi que ce puisse être, que s’il vous vient à plaisir et à gré, qu’il n’eût pu mieux tomber en autre main quelconque, qu’à l’endroit de celui qui n’a en souhait et admiration que l’excellence des lettres et de la vertu.